jeudi 29 septembre 2011

Histoire de l’aigle d’André Gide, Le Prométhée mal enchaîné

«Un oiseau qui de loin paraît énorme,  mais qui n’est,  vu de près,  pas du tout si grand que cela,  obscurcit un instant le ciel du boulevard – fond comme un tourbillon vers le café, brise la devanture, et s’abat,  crevant l’œil de C. d’un coup d’aile,  et avec force pépiements,  tendres oui mais impérieux,  s’abat sur le flanc droit de Prométhée.
Celui-ci ouvrant aussitôt son gilet offre un morceau de son foie à l’oiseau.»

Manger ou être mangé?  Que choisir? 
Dévorer son aigle ou se laisser dévorer par lui?
A chacun son Mal !
Quel est celui qui fond sur nous n’importe où et à toute heure quand on s’y attend le moins ? 
Douleur physique fulgurante,
Insatisfaction morale permanente,
Crainte perpétuelle,
Amour insatiable et insatisfait,
Espoir de gloire,
Crainte de déchoir,
Peur de mourir,
Vision du paradis,
Folie….
Quel est notre aigle favori?

Solution:
 Retrouver l’instinct du chasseur.
Tuer l’aigle et tous les dieux.
Vivre le présent.
Oublier.
S’en aller nu vers un bonheur champêtre,
Inviter ses amis
Manger l’aigle avec eux.
N’en garder que les plumes
Rire et beauté !

Excipit:
«Le repas fut plus gai qu’il n’est permis ici de le redire, et l’aigle fut trouvé délicieux.
-         Il n’aura donc servi à rien ? demanda-t-on.
-         Ne dites pas cela ! – Sa chair nous a nourris.- Quand je l’interrogeais, il ne répondait rien… Mais je le mange sans rancune : s’il m’eût fait moins souffrir il eût été moins gras ; moins gras il eût été moins délectable.
-         De sa beauté d’hier que reste-t-il?
-         J’en ai gardé toutes les plumes.
 C’est avec l’une d’elles que j’écris ce petit livre ; puissiez-vous, rare ami,ne pas le trouver trop mauvais.»
  Histoire de l’aigle d’André Gide dans «Le Prométhée mal  enchaîné» (Gallimard, nrf, 1925/1978)

5 commentaires:

  1. Un beau symbole pour se poser les questions essentielles !

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  2. ötli, C'est exactement ça! Et les remords et la culpabilité quand on a été élevée par des religieuses, c'est une torture à vie!

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  3. On ne peut se resoudre à sacrifier ou se séparer d'un être animal ou humain quand il nous a constamment marqué de sa présence à un moment ou à un autre de notre vie.
    Il me vient à l'esprit ce père de famille qui,ayant élevé un lapin, ne se décida pas à l'égorger pour en faire un repas, mais préféra l'échanger au marché contre un autre lapin et dont il en fit un régal en toute bonne conscience!

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  4. un petit voyage sur vos traces écrites et lectures de votre semaine
    touonne menthe à l'eau avec galçon sur une terrasse au soleil
    jours autant de plaisir de vous siroter comme une b

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  5. comme une menthe à l'eau avec galçon au soleil
    merci de nous faire de blle marque d'encres à lire
    à tout bientôt

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