La mer alors effaça les dessins. «Puis les ténèbres se refermèrent, éphémères ténèbres de l’enfance qui précèdent l’aube douloureuse de l’âge d’homme.»
Maurice, orphelin de père, vivait dans une confortable maison près de Londres avec sa mère et ses deux sœurs mais le départ d’un jeune jardinier fut son premier vrai chagrin
A dix-neuf ans, à la sortie du collège, il prononça un discours en grec de sa composition et toute l’école l’acclama «non parce qu’il était exceptionnel mais parce qu’il était moyen.»
Cette fois encore, un des adultes présents le sermonna : «L’homme est né de la femme et il doit aller vers la femme si on veut que l’espèce humaine se perpétue et, sous couleur d’être aimable, il sut habilement trouver les mots qui font mal.»
A Cambridge où il alla ensuite, il travailla et se montra aimable. « Grimper sur le flanc de la montagne, tendre la main vers la cime jusqu’à ce qu’une autre main prenne la sienne, tel était le seul but de son existence… Maurice se préparait à entrer dans la niche que l’Angleterre lui avait préparée. »
C’est alors qu’il devint l’ami platonique de Clive Durham, un autre étudiant comme lui, après un été qu’il passa à lire Le banquet de Platon.
« Je vous aime » lui chuchota Durham
« Je vous aime » lui chuchota Durham
Maurice fut horrifié, scandalisé. De toute son âme de petit bourgeois, il était choqué. « Non, mais vous rigolez ! » s’exclama-t-il. Sa réaction, ses mots furent plus prompts que sa pensée. « Durham, dit-il, nous sommes anglais tous les deux, ne dites donc pas de sottises!... Vous n’ignorez pas que c’est le seul sujet absolument tabou, le seul écart impardonnable. »
Plus tard seulement ils s’acceptèrent et devinrent intimes.
Cependant, à la fin de leurs trois années d’études, Durham, ambitieux et peu courageux à la fois, choisit la "normalité", se maria, fit de la politique et encouragea son ami à suivre le même chemin, En ce début de XXe siècle, la société anglaise punissait encore de mort l’homosexualité.
Plus tard seulement ils s’acceptèrent et devinrent intimes.
Cependant, à la fin de leurs trois années d’études, Durham, ambitieux et peu courageux à la fois, choisit la "normalité", se maria, fit de la politique et encouragea son ami à suivre le même chemin, En ce début de XXe siècle, la société anglaise punissait encore de mort l’homosexualité.
Maurice souffrit beaucoup de cette forme de trahison. A son tour il voulut guérir et vit divers médecins mais « tout était si compliqué ! Quand l’amour disparaît, le souvenir qu’il laisse ne lui ressemble pas.»
Finalement, au cours d’un séjour à Penge, chez Clive et sa jeune femme, il rencontra Alec Scudder, un jeune garde-chasse qui devait partir quelques jours plus tard en Argentine par le prochain bateau. Ce fut une attirance physique, immédiate et réciproque.
Maurice tenta encore de résister, mais cette fois non plus à cause d' interdictions morales ou religieuses mais pour des raisons purement sociales. Il avait l’impression de déchoir en allant avec un être d’une condition si inférieure.« Je suis tout de même un gentleman – public school, Cambridge, et tout ça. Maintenant encore, je n’arrive pas à croire que j’aie pu aller avec lui »
Quelques péripéties plus tard, le bateau pour l’Argentine partit sans Alec qui préféra rester avec son nouveau compagnon malgré les menaces familiales et Maurice et Clive, après une ultime rencontre, se séparèrent à jamais, sans que Clive comprenne « que tout était fini, sans crépuscule ni compromis, que leurs routes ne se croiseraient jamais plus, qu’ils n’entendraient plus jamais parler de lui. »
C'est pour moi un coup de cœur total, au même titre que "Avec vue sur l'Arno" Plus j'aime un auteur et plus j'ai du mal à en parler. Forster est un écrivain cher à mon cœur! Dommage qu'il ne me reste plus que "La route des Indes" et "Le plus long des voyages " à lire encore! (Merci Lilly,grâce à toi, la liste s'allonge!)
Très belle adaptation de James Ivory avec James Wilby, Hugh Grant, Rupert Graves
Maurice de Edward Morgan Forster(Christian Bourgois, 1971/1987,279 p)
Traduit de l’anglais par Nelly Shklar,
J'ai été très emballée d'abord par le film, ensuite par le livre, même si je l'ai trouvé plus sombre que les autres romans de Forster.
RépondreSupprimerTrès belle présentation, je souligne "Maurice", dans ma LAL depuis... ben depuis la blogosphère je crois, il est aimé ! Et la première couverture est vraiment superbe.
RépondreSupprimerC'est un livre magnifique mais la fin est optimiste pour moi puisqu'il choisit de s'accepter enfin contrairement à Clive, son premier amour!
RépondreSupprimerYs, oui, la première couverture résume bien les deux dilemmes de Maurice: sa propre nature homosexuelle mais aussi et peut-être surtout les contraintes sociales imposées par la société de l'époque et de l'endroit. La vraie déchéance est de choisir quelqu'un de la classe inférieure! La photo le montre très bien!
RépondreSupprimerBonjour Mango, je n'ai vu que le film d'Ivory que j'avais beaucoup aimé. Bonne journée.
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RépondreSupprimerEt dire que je ne connais pas...
RépondreSupprimerDasola, Le film, je trouve, complète vraiment bien le livre. Il m'a semblé plus troublant dans les scènes d'amour. Le livre reste très réservé, lui!
RépondreSupprimerclara, tu l'aimerais, je suis sûre!
RépondreSupprimerj'aime bien les passages que tu as choisis, son style me donne envie
RépondreSupprimerJ'ai vu tous les films tirés des romans de Forster sans avoir lu les romans... j'ai une passion pour "Chambre avec vue" dont j'ai acheté le roman récemment !!!
RépondreSupprimerJe comprends ta difficulté à parler de ce livre, puisque j'ai eu la même ;o) Forster est vraiment un auteur qui appartient à mon panthéon personnel. En revanche, contrairement à Aifelle, je trouve que "Maurice" est l'un des romans les moins sombres de l'auteur. Il finit rejeté par la société (du moins, c'est plus que probable), comme George et Lucy dans "A Room with a view", mais "Monteriano" ou "Route des Indes" sont loin d'être si nuancés.
RépondreSupprimerTu as lu "Le plus long des voyages" ? C'est le seul qu'il me reste à lire, mais j'hésite, j'ai peur de me retrouver sans roman de Forster que je n'ai jamais lu...
Erzébeth et Yue Yin ont aussi fait des billets sur "Maurice" sinon.
Un livre magnifique, je suis tout à fait d'accord! Je veux lire tout Forster depuis!!!
RépondreSupprimerCet été, grande décision : je lirai Foster! Je vais commencer par Chambre avec vue. Le film est tellement beau ! D'après toi, quel pourrait être le deuxième livre?
RépondreSupprimerJ'adore ta présentation, on y sent bien l'humour de l'auteur. Eh bien moi, je n'ai trouvé à la bibliothèque que "Le plus long des voyages" qui vous intrigue Lilly et toi ;) la 4e de couv' dit que c'est le roman préféré de l'auteur, mais j'ai plus de mal à m'y plonger que dans "Vue sur l'Arno".
RépondreSupprimeresmeraldae, il écrit à l'anglaise, avec toujours des traits d'humour.
RépondreSupprimerGeorge, avant, "Chambre avec vue " était mon préféré. Maintenant j'hésite: celui-ci est beau aussi!
RépondreSupprimerLilly, je te comprends bien! Finalement il a assez peu écrit de romans! Dommage! Heureusement cependant que les films ne le trahissent pas!
RépondreSupprimerKarine:) Ses livres résistent bien aux relectures. Je relirai certainement celui-ci aussi dans quelque temps!
RépondreSupprimerclaudialucia, et bien justement, juste après "Chambre avec vue", c'est "Maurice" que j'ai préféré et le film est très beau aussi!
RépondreSupprimerrose, c'est son préféré? Sachant cela, ça me rend doublement surieuse de le lire!
RépondreSupprimerje n'ai encore jamais lu cet auteur.je le rajoute à ma liste.
RépondreSupprimeralinea, tu ne peux que l'aimer, tu verras!
RépondreSupprimerUn superbe roman qui m'a permis de découvrir Forster. Pour une fois, c'est le cinéma qui m'a mené à la littérature puisque c'est le film d'Ivory qui m'a donné envie de lire le roman (je crois d'ailleurs que mon aversion envers Hugh Grant date de ce film ;o) ).
RépondreSupprimerIn Cold Blog, Pauvre Hugh Grant! Je l'aime bien pourtant! :)
RépondreSupprimerQuant au roman, j'ai bien lu ton billet mais quand j'ai voulu le mettre en lien, ça m'a été impossible et je ne peux plus rentrer sur ton blog! J'espère que c'est momentané!
Pas tentée du tout par le sujet qui revient de plus en plus dans les bouquins au point de me lasser et de me dire dorénavant quand je découvre ce sujet dans un livre : encore...
RépondreSupprimerGéraldine, oui, mais ici il faut tenir compte de son époque! C'était alors un sujet si brûlant que l'auteur n'a pas voulu le publier pendant sa vie
RépondreSupprimerKarine me l'a offert à l'occasion du swap "happy face", il me tarde de le lire !
RépondreSupprimerJ'aime beaucoup l'écriture de cet auteur, même si il y a longtemps que je ne l'ai pas lu (Retour à Howard Ends).
RépondreSupprimerJ'avais aimé "Avec vue sur l'arno" mais sans être un coup de coeur (pas de flagellation stp ;-) ) Mais je note celui-ci quand même !
RépondreSupprimerBon par ta faute je viens d'acheter "Maurice" et "Retour à Howard end"...!!!! merci quand même !!
RépondreSupprimerP.S: j'aime beaucoup ta nouvelle présentation !
Stephie,tu vas l'aimer,j'en suis sûre!
RépondreSupprimerAlex, il a un style toujours très moderne et j'aime ses personnages.
RépondreSupprimerManu, je vais beaucoup m'avancer mais ce n'est pas possible que tu n'aimes pas celui-ci!
RépondreSupprimerGeorge, non pas à cause mais ce sera grâce à moi et j'en serai fière, tu verras, parce que tu vas les aimer,c'est forcé!
RépondreSupprimerTant mieux pour ma présentation!
C'est curieux, j'ai l'impression de voir le nom de Forster partout en ce moment! Moi qui ne connaissais même pas son existence il y a peu, je le crois désormais sans cesse... Un signe?
RépondreSupprimerJ'ai très envie de découvrir cet auteur et j'ai commandé "La route des Indes" mais en anglais, histoire de tenter d'améliorer mon angalis... ;-)
RépondreSupprimerKali, Découvert depuis un an seulement,je ne peux plus m'en passer!
RépondreSupprimerLounima, en anglais! Tu as toute mon admiration! Je ne m'en sens plus capable!
RépondreSupprimerJ'ai A-DO-RE le film et le roman - vu et lu plusieurs fois. Tu me donnes envie de renouveler l'experience !
RépondreSupprimerL'ogresse, je te comprends tout à fait. Je suis sûre de les relire et revoir aussi! Je les A-DO-RE tous les deux comme toi!
RépondreSupprimerInconditionnelle du roman et du film. Un grand choc personnel depuis 2 ans: jamais je n'ai lu de texte décrivant aussi bien les émotions et déchirements intérieurs. S'y plonger et revivre. Je cherche les autres textes de Forster en français, c'est pas gagné...
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