jeudi 10 septembre 2009

Mimi Pinson d'Alfred de Musset

Deux étudiants en médecine à Paris, Eugène et Marcel, sont amis malgré leurs caractères opposés. Eugène est timide, travailleur et chaste, Marcel, plus âgé, est un bon vivant, chahuteur et insouciant. Eugène ne sort jamais et passe son temps à rêver, Marcel mène une vie de bohème, le soir, dans les cafés à la mode et les théâtres. Bientôt, grâce à la conspiration de ses amis, Eugène est amené à rencontrer des jolies grisettes, rieuses, insouciantes et frivoles. Il est surtout attiré par l’une d’elles, Mimi Pinson, qui chante comme l’oiseau. Ce sont des petites mains qui travaillent pour les grands couturiers. Elles sont pauvres et la protection sociale n’existe pas encore, mais elles sont fières, font toujours bonne figure et sont toujours prêtes à chanter et à danser. C’est ce qu’elles font un fameux soir

Marcel

organise une grande fête : on chante, on boit, on rit. Mimi casse une assiette et, en se servant des morceaux comme de castagnettes, chante sa fameuse chanson, la chanson de Mimi Pinson. On se sépare au matin.

Eugène, en rentrant chez lui, tombe sur une amie de Mimi qui se traîne dans la rue et semble bien malade. Il l’aide à rentrer chez elle et ouvre la lettre qu’elle lui a demandé de poster à sa place. Il découvre qu’elle y demande l’aumône à un certain baron.

Elle n’a même plus de quoi se nourrir et meurt littéralement de faim.

ATTENTION! NE PAS LIRE si on ne veut pas connaître la fin! L'histoire est tès courte et comme je désire m'en souvenir, je la raconte en entier!

En secret, il lui fait remettre de la nourriture et emprunte de l’argent à un usurier pour aider la pauvre fille. Marcel, son ami, cherche à l’en dissuader et se moque de lui, en vain, car Eugène, très croyant, veut aider son prochain.

Chez le barbier devenu usurier, il aperçoit la robe de Mimi, celle de la chanson, qu’elle vient de mettre en gage. Il la croise dans la rue, revenant de sa messe matinale. Elle n’est vêtue que d’un jupon et d’un vieux rideau lui servant de châle. Emus, les deux amis, Marcel et Eugène, rachètent sa robe qu’elle remet aussitôt pour aller secourir son amie.

Les étudiants la quittent pour suivre leurs cours mais le soir, en passant devant le célèbre café Tortoni très à la mode, ils surprennent les deux jeunes filles assises à la terrasse et riant

aux éclats. Eugène est épouvanté devant une telle insouciance mais Marcel termine le conte sur ces paroles :

« Je t’en prie, quand tu diras du mal des grisettes, fais une exception pour la petite Pinson. Elle nous a conté une histoire à souper, elle a engagé sa robe pour quatre francs, elle s’est fait un châle avec un rideau ; et qui dit ce qu’il sait, qui donne ce qu’il a, qui fait ce qu’il peut, n’est pas obligé à davantage. »

Bien entendu, ce n'est pas l'histoire elle-même qui m'intéresse! Ce n'est qu'une bluette sentimentale d'avant la Révolution de 1848. Contrairement à Victor Hugo , à la veille de commencer "Les Misérables, Musset, lui, le romantique, ne se révolte pas contre la misère qu'il décrit. Au contraire, la morale du conte est de se soumettre à sa condition sociale mais en s'aidant mutuellement.

Le plaisir pris à cette lecture tient essentiellement à l'écriture elle-même et aux nombreuses remarques de l'auteur .

La grisette est alors une figure de la vie parisienne ; c’est une jeune ouvrière pauvre, coquette et galante. Les «Scènes de la vie de bohème» de Henry Murger parurent en feuilleton dès 1845, évoquant des personnages réels connus du public parisien.

La Bohème de Puccini, un des plus célèbres opéras, fut adaptée par la suite, en 1896 de la pièce de Murger. On y trouve, de nouvelles grisettes, Mimi, Musette, aussi insouciantes, touchantes et malheureuses que Mimi Pinson ! (J'aurais aimé mettre ici une vidéo de La Callas chantant l'air de Mimi de Puccini, mais je ne sais pas encore faire ça! Je suis toujours en apprentissage!)

La morale du conte est conservatrice et ne remet pas encore en cause l’ordre social. Pour la jeunesse, la bohème n’est qu’une étape transitoire où s’opère une véritable sélection sociale ; les faibles et les idéalistes meurent, ne survivent que ceux qui savent se compromettre. Mimi Pinson est une œuvre écrite l’année même de « Il faut qu’une porte soit ouverte ou fermée. »

Mimi Pinson, profil de grisette, conte de Alfred de Musset (1810-1867) (Librio), 31 pages, écrit en 1845, ouvrage composé pour « Le Diable à Paris » En 1958, un film de Robert Darène s’est inspiré de ce conte

La chanson de Mimi Pinson de Alfred de Musset (1845)

Mimi Pinson est une blonde,
Une blonde que l'on connaît.
Elle n'a qu'une robe au monde,
Landerirette !
Et qu'un bonnet.
Le Grand Turc en a davantage.
Dieu voulut de cette façon
La rendre sage.
On ne peut pas la mettre en gage,
La robe de Mimi Pinson.

Mimi Pinson porte une rose,
Une rose blanche au côté.
Cette fleur dans son coeur éclose,
Landerirette !
C'est la gaieté.
Quand un bon souper la réveille,
Elle fait sortir la chanson
De la bouteille.
Parfois il penche sur l'oreille,
Le bonnet de Mimi Pinson.
Elle a les yeux et la main prestes.
Les carabins, matin et soir,
Usent les manches de leurs vestes,
Landerirette !
A son comptoir.
Quoique sans maltraiter personne,

Mimi leur fait mieux la leçon
Qu'à la Sorbonne.
Il ne faut pas qu'on la chiffonne,
La robe de Mimi Pinson.
Mimi Pinson peut rester fille,
Si Dieu le veut, c'est dans son droit.
Elle aura toujours son aiguille,
Landerirette !
Au bout du doigt.
Pour entreprendre sa conquête,
Ce n'est pas tout qu'un beau garçon :
Faut être honnête ;
Car il n'est pas loin de sa tête,
Le bonnet de Mimi Pinson.

D'un gros bouquet de fleurs d'orange
Si l'amour veut la couronner,
Elle a quelque chose en échange,
Landerirette !
A lui donner.
Ce n'est pas, on se l'imagine,
Un manteau sur un écusson
Fourré d'hermine ;
C'est l'étui d'une perle fine,
La robe de Mimi Pinson.

D'un gros bouquet de fleurs d'orange
Si l'amour veut la couronner,
Elle a quelque chose en échange,
Landerirette !
A lui donner.
Ce n'est pas, on se l'imagine,
Un manteau sur un écusson
Fourré d'hermine ;
C'est l'étui d'une perle fine,
La robe de Mimi Pinson.

Mimi n'a pas l'âme vulgaire,
Mais son coeur est républicain :
Aux trois jours elle a fait la guerre,
Landerirette !
En casaquin.
A défaut d'une hallebarde,
On l'a vue avec son poinçon
Monter la garde.
Heureux qui mettra sa cocarde
La chanson de Mimi Pinson
de Alfred de Musset (1845)

La maison de Mimi Pinson par Utrillo

16 commentaires:

  1. C'est tout de même dommage de raconter autant l'histoire de ce conte. Du coup, à quoi bon le lire ? Snif...

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  2. Je viens de me rendre compte que ce livre devrait faire partie de ma Pal mais que j'ai oublié de le compter.... j'ai fait l'impasse sur une étagère...!
    ça me fait aussi penser à cette statue de la Grisette à Paris ( place de la République).

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  3. Cécile, tu as tout à fait raison et je suis désolée! Emportée par mon élan,je n'y ai plus songé! J'ai essayé d'y remédier maintenant,je ne vois pas d'autres moyens, n'ayant pas accès au fond noir! merci de me l'avoir signalé!
    Ceci dit, Musset est à lire pour lui-même , dans ce récit, pour son style, son écriture, ses pensées,la morale qu'il en tire.Lis-le tu verras que c'est surtout ça qui compte ici! :) Ne pleure pas surtout!:)

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  4. dominique, je ne connais pas cette statue! J'ai dû la voir sans y prêter attention!
    Tu as découvert ainsi combien de nouveaux livres dans ta Pal? :))

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  5. J'ai Mimi Cracra dans la tête pour la journée, merci Mango, et merci ma capacité à faire des comparaisons douteuses...

    Sinon, je n'ai jamais lu Musset ailleurs que dans son théâtre et sa poésie (que j'adore), mais j'avoue que je ne suis pas plus tentée que ça par ce texte.

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  6. Un magnifique article ma Belle !!!

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  7. Lilly, quelle mignonne cette Mimi Cracra avec sa chanson!:)

    Ce n'est pas ici le meilleur de Musset mais c'est plutôt l'évocation de deux figures typiques de cette époque:le bohème et la grisette!

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  8. Celsmoon m'a devancé mais ton article est très bien construit et très intéressant. ;-)

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  9. Tout comme Emilie, je trouve que ton article est très intéressant ! :D

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  10. Bonjour pourriez-vous répondre à quelques questions :

    Quand et où l'histoire se déroule t-elle? (si possible donnez des indications)

    A quelles classes social appartiennent les personnages?

    Merci d'avance =)

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  11. Anonyme, si vous lisez bien, tout est déjà dit dans l'article! Le mieux serait encore de lire Musset lui-même! le texte est court!

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  12. Passionnant ton billet, enrichi avec toute cette documentation.

    Bonne journée

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  13. J ai lu le livre mais je n'ai pas compris la fin ... Les deux grisettes ont fait une farce à Marcel et Eugène ? Ou c est juste qu'elles ont été remboursée par l'homme à qui Rougette avait écrit ?

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