samedi 27 juin 2009

Autoportrait de l'auteur en coureur de fond de Haruki Murakami


Dès la première page, l’auteur déclare qu’un homme de qualité ne devrait pas se répandre en public sur les moyens qu’il utilise pour se maintenir en forme. « J’éprouve quelque scrupule à écrire ce livre mais cet ouvrage a pour sujet la course, pas du tout la santé. Ce que j’ai voulu faire, c’est exposer mes pensées sur le sens que revêt pour moi, en tant qu’être humain, le fait de courir. Tout simplement m’interroger, chercher les réponses. »
Pourquoi un écrivain célèbre comme Haruki Murakami, l’auteur de récits aussi intéressants et inspirés que : « Au sud de la frontière, à l’ouest du soleil », « Kafka sur le rivage », « Saules aveugles, femme endormie », pourquoi ressent-il un jour le besoin de raconter et d’expliquer une de ses plus chères habitudes, cette nécessité de courir une dizaine de kilomètres chaque jour, six jours par semaine ? Il l’affirme dès le début : « Ecrire franchement sur le fait de courir, c’est, je crois, également écrire franchement sur moi-même en tant qu’homme. Voilà ce dont j’ai pris conscience en cours de route. C’est pourquoi il ne me semble pas faux de lire cet ouvrage comme une sorte de « mémoire », dont le pivot est l’acte même de courir. C’est moi seul que je présente ici. La course est l’élément majeur de ma vie quotidienne. »
Le livre se lit agréablement mais comme je ne suis pas une adepte de la course à pied, le chapitre qui, de loin, m’a le plus intéressée est le quatrième, consacré à la journée du 19 septembre 2005 à Tokyo et dont le sous-titre est « Une grande partie de mes techniques de romancier provient de ce que j’ai appris en courant chaque matin. »
Murakami entreprend alors de démontrer que, pour lui, écrire un roman et courir un marathon sont deux activités qui se ressemblent.
A la question rituelle concernant les qualités nécessaires pour devenir un grand écrivain, il répond qu’il en voit trois : le talent dont on n’est pas maître, la concentration et la persévérance qui, elles, dépendent de la volonté de chacun. Il donne comme exemple le cas de Raymond Chandler, l’auteur de romans noirs qui, même s’il n’écrivait rien, s’obligeait à s’asseoir à sa table chaque jour sans exception, un certain nombre d’heures et à demeurer là, seul, la conscience en éveil. Par cet exercice quotidien, il renforçait sa volonté.
Murakami affirme aussi que, pour lui, écrire un roman est fondamentalement un travail physique qui nécessite de mettre en œuvre toute son énergie et d’aller jusqu’à se surmener.
« Pour moi, courir est à la fois un exercice et une métaphore. En courant jour après jour, en accumulant les courses, je dépasse les obstacles petit à petit et, lorsque j’ai réussi à franchir un niveau supérieur, je me grandis moi-même. Durant les courses de fond, le seul adversaire que l’on doit vaincre, c’est soi, le soi qui traîne tout son pas".
*****
J’ai recueilli quelques autres citations qui me permettent de mieux connaître cet auteur que j’aime tant lire, où il avoue son amour de la solitude, son impression de n’être pas très aimé, et son épitaphe possible.
« J’ai toujours eu cette inclination depuis ma jeunesse : lorsque j’avais le choix, je préférais invariablement lire des livres seul ou bien me concentrer à écouter de la musique plutôt que d’être en compagnie de quelqu’un d’autre. »
« Je ne pense pas que beaucoup aiment ma personnalité. Très rares sont ceux qui aiment quelqu’un comme moi, quelqu’un qui ne fait aucun compromis, et qui, au contraire, lorsqu’un problème surgit, va s’enfermer tout seul dans son bureau. »
« Mon temps, le rang que j’obtiens, mon apparence, les critiques des autres, tout cela est secondaire. Pour un coureur comme moi, ce qui est vraiment important est d’atteindre le but que j’ai assigné à mes jambes. »
« De chaque échec, de chaque bonheur, j’essaie de tirer une leçon concrète (qu’importe qu’elle soit minuscule si elle est concrète). »
« Un jour, si je possède une tombe et que je suis libre de choisir ce qui sera gravé dessus voilà ce que j’aimerais y lire :
« Ecrivain (et coureur) au moins jusqu’au bout il n’aura pas marché. »
Un livre qui parle autant de l’écrivain que du coureur de fond. J’ai aimé.
Autoportrait de l’auteur en coureur de fond de Haruki Murakami
(Belfond, 2009, 181 pages, traduit du japonais par Hélène Morita)

14 commentaires:

  1. Je n'ai lu qu'un Murakami "Kafka sur le rivage" et voilà longtemps que je me promets d'en lire un autre car il m'a beaucoup plu. Mais bien que je sois sportive, je déteste courir (j'abrège toujours lors des échauffements...) et ce livre-là ne me tente pas. J'en choisirai un autre...
    PS : je reviens de la bib avec "Haut vol" sous le bras... (entre autres...)

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  2. Ys, j'espère que "Haut vol" va te plaire!
    Pour moi j'au du retard sur mes lectures. Il me reste à commenter "Kafka sur le rivage" pour le Blog-0-Trésors" que j'ai un peu négligé.
    Et puis les tags et les jeux qui fleurissent en ce moment sont bien tentants aussi!

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  3. Je n'ai jamais lu cet auteur et pour l'instant, j'hésite à ma lancer. Je ne suis pas sûre qu'il me convienne.

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  4. Un auteur que j'aime beaucoup mais sur lequelje n'arrive pas à écrire! Tu t'en sors très bien !:)

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  5. J'avais peur que ce livre soit ennuyeux. Haruki Murakami est un de mes écrivains chouchou que j'ai malheureusement un peu délaissé ces derniers temps. Et mon blog aussi je le délaisse en ce moment :$

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  6. Pourquoi pas, même si je suis un piètre coureur malgré mes tentatives.

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  7. Aifelle, heureusement que nous n'avons que l'embarras du choix pour nos lectures! Chacun ses préférés! C'est aussi ce que j'aime dans les blogs.

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  8. Cathulu, Tu trouves? Sans les blogs, je n'aurais jamais connu cet auteur!

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  9. Manu, Avec tous les préparatifs que tu dois avoir en ce moment, ce n'est pas étonnant, mais je te fais confiance, tu reprendras vite ton rythme, pour mon plus grand bonheur!

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  10. Yv, moi,je n'essaie même pas! Je l'ai surtout lu pour mieux connaître l'auteur.:)

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  11. De Murakami j'ai lu " Kafka sur le rivage " que j'ai aimé.

    Quant à la nécessité d'aimer la course pour apprécier un livre qui en parle, j'ai fait une expérience qui m'a convaincue du contraire!

    J'ai lu, il y a quelque 20 ans, un roman intitulé : "La grande course de Flanagan "de Tom McNab. Ce n'est pas un livre autobiographique et philosophique comme celui de Haruki Murakami mais plutôt un roman d'aventure (si on peut le définir ainsi?), un roman historique (la course de Flanagan existe ) sociologique (les raisons de courir), psychologique (le dépassement de soi-même) un roman d'amour et d'amitié, bref un roman passionnant, haletant (c'est le cas de le dire) qui avait fait le tour de la famille et des amis.
    Il m'avait d'ailleurs convertie à la course et j'ai dû faire au moins l'aller-retour de mon jardin à la maison et vice-versa en courant (200 mètres). L'exploit!

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  12. Très amusant! Comme quoi,la lecture peut mener à tout, même à nous faire courir! Bienvenue!
    (Je ne peux m'empêcher de noter le titre cité!)

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  13. La course à pied ne me branche pas non plus, et j'ai du mal imaginer un quelconque rapport avec l'écriture mais bon, pourquoi pas lire celui-ci un jour. J'aime beaucoup Murakami.

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  14. Sylire, je dois dire que j'ai davantage choisi ce livre pour son auteur que pour son sujet! Je ne le regrette pas!

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