C’est dans ce territoire désolé, obscur, inhumain sous les ponts et dans les tunnels, que se déroule l’histoire de Nathan Walker, un noir du Sud qui épouse une blanche Irlandaise aux cheveux roux dont il aura trois enfants, en dépit du racisme de cette époque. Malgré un travail des plus pénibles étouffant, dangereux, mal payé, mal protégé, Nathan et ses amis sont heureux et solidaires. Ils ont appris à se jouer du vertige et de l’obscurité et courent de poutres en poutrelles comme si de rien n’était. Ils sont devenus des ouvriers acrobates, de vrais artistes dans leur genre et ils en ont conscience et ils en sont fiers. A l’occasion, ils découvrent la trace d’un premier essai de métro datant du XIX e siècle et qui devait égaler la splendeur de celui de Moscou. Mais les accidents de la vie les rattrapent vite et les vies se brisent tandis que New York s’affirme et resplendit de toute sa puissance et sa modernité.
Les personnages, de constructeurs forts et fiers et fraternels redeviennent de simples individus fragilisés qui se replient d’abord sur leurs familles, puis sur leurs camarades et qui finissent par s’enfermer en eux-mêmes, ne comptant plus que sur l’alcool, la drogue, la violence, la folie pour survivre à la misère dans laquelle ils vont sombrer. Les temps sont durs et nulle solidarité sociale ne peut les sauver d’eux-mêmes et de leurs souvenirs douloureux.
On suit le destin de la famille de Nathan sur plusieurs générations, à Harlem, de 1916 à 1991. C’est une grande fresque qui n’a de noir que le réalisme des événements mais que l’auteur magnifie en s’identifiant à chacun de ses héros, en les faisant vivre de l’intérieur, avec leurs rêves et leurs folies. Le monde des clochards que beaucoup sont devenus en est ainsi transfiguré. Ils demeurent pour toujours ces bâtisseurs du ciel qu’ils furent dans leur jeunesse ou que furent leurs pères. Tout leur est bon pour échapper à leur dure réalité.
Ce livre est magnifique: la maîtrise de l’auteur quant à la construction de l’intrigue, le traitement des personnages et le style m’ont totalement conquise.
Je viens de me procurer son tout dernier livre, paru le 13 août : « Et que le vaste monde poursuive sa course folle ». Il fera partie de mon challenge du 1% littéraire de la rentrée.
Les saisons de la nuit de Colum McCann ( Belfond, 1998, 322 pages, traduit de l’anglais (Irlande) par Marie-Claude Peugeot) Titre original : This side of brightness
je viens de lire le résumé de son dernier roman, il m'a l'air sympa! je ne le connaissais pas.
RépondreSupprimerJe l'avais repéré à sa sortie et tu relances mon envie de le lire.
RépondreSupprimeresmeraldae, on en dit beaucoup de bien jusqu'ici mais on verra!
RépondreSupprimerAifelle, le résumé est prometteur et j'ai aimé le livre que j'ai lu de cet auteur!
RépondreSupprimerJ'ai adoré aussi "Les saisons de la nuit" et il n'est pas dit que je ne craque pas pour "Et que le vaste monde..." ;-)
RépondreSupprimerKathel, J'espère aussi que son nouveau livre nous plaira autant que celui-ci!
RépondreSupprimerAlors là, je ne connaissais absolument pas ce livre qui traite des sujets qui me sont chers ! Je le note pour me le procurer très vite ... Ce sera une occasion de découvrir un auteur que je ne connais que de nom et de réputation !
RépondreSupprimerNanne, je viens tout juste de le découvrir également,grâce aux blogs qui en ont parlé, toujours positivement jusqu'ici!
RépondreSupprimerJ'ai toujours eu peur que ce roman soit trop sombre. Pourtant, il traite d'une de mes villes fétiches où je serai dans une semaine !!
RépondreSupprimerManu, les situations des personnages sont épouvantables, c'est vrai, mais curieusement,le talent de l'auteur magnifie tout.On ressent un grand souffle de vitalité, d'humanité, de rêves poétiques dans toute cette désespérance!
RépondreSupprimerManu, j'ai oublié: je te souhaite plein de belles choses dans cette ville qui te plaît tant! Quelle veinarde! Tu la verras sous un tout autre aspect que dans ce livre et heureusement!
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