samedi 4 juillet 2009

La brève et merveilleuse vie d'Oscar Wao par Junot Diaz

Oscar Wao est un jeune américain vivant dans le New Jersey, avec sa mère et sa sœur. Ce sont des exilés venus de Saint-Domingue pour fuir la violence du pouvoir dictatorial qui y règne. La mère, Belicia et la soeur, Lola, sont des beautés trahies,

battues par les hommes qu’elles aiment. Leurs histoires nous sont racontées tour à tour par le narrateur qui n’est autre que l’amoureux infidèle de Lola et l’ami étudiant d’Oscar.

Ce dernier est un anti-héros par excellence : obèse, solitaire, grand lecteur, amateur de BD, de SF, de Tolkien surtout et de son monde dans lequel il se perd souvent en compensation de sa vie gâchée. Rien ne lui réussit et surtout pas l’amour dont il est obsédé. Il redoute par-dessus tout de mourir vierge, ce qui serait un grand déshonneur dans son milieu, mais son destin semble pourtant bien être celui-là ! Il parle trop à tort et à travers, il est trop maladroit et s’amourache toujours de la fille qui le repoussera jusqu’au jour où, de retour dans son île d’origine, il tombera follement amoureux d’une femme plus âgée qui a beaucoup vécu et c’est naturellement un euphémisme. Le souteneur de cette femme supportera-t-il la situation ? Peu importe ! Oscar, ne veut plus repartir. Son destin n’est-il pas tout tracé?

Jamais plus je n’oublierai Oscar Wao, le héros de ce véritable chef d’œuvre qu’est ce premier roman de Junot Diaz. C’est aussi fort que du Céline, aussi fou, aussi osé, aussi complexe et surtout d’une écriture aussi nouvelle, brutale, morcelée, chaloupée, violente et poétique à la fois, un mélange de jazz, de slam, d’argot des ghettos latinos-américains et de prose classique. Tout y passe de notre époque : la violence surtout, le métissage des peaux, des cœurs et des cultures, confronté à l’éternelle recherche individuelle de l’amour et de la reconnaissance sociale. C’est aussi le passé douloureux d’une île, Saint Domingue, encore hantée par l’horreur de la dictature de Trujillo, dans les années 40/50, l’exil forcé d’une bonne partie de sa population, les croyances superstitieuses et religieuses de la population, le vaudou, le «fuku » surtout, le grand responsable de la malédiction qui pèse depuis trois générations sur la famille dont il est question dans le livre. Le « fuku » est la force maléfique, le destin contre lequel il ne sert à rien de lutter. Quoi que fasse Oscar, le dernier rejeton de cette famille prédestinée au malheur, tout le pousse jusqu’à la tragédie finale. C’est aussi pur que du Sophocle, Ce livre est digne des tragédies antiques !

Ce résumé n’évoque qu’à peine le dixième de ce roman foisonnant, trop riche pour se laisser museler par les critiques. Il explose de vie, il est écrit magnifiquement et on en reparlera longtemps. Son influence ne fait que commencer

La brève et merveilleuse vie d’Oscar Wao par Junot Diaz

(Plon, « Feux croisés », 293 pages, janvier 2009, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Laurence Viallet)

Prix Pulitzer 2008

20 commentaires:

  1. ouh là, on sent l'enthousiame !:) Dommage que la couv' desserve autant le livre.

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  2. Je note, si je le trouve en bibliothèque je me lancerai peut-être.

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  3. je l'avais lu il y a plusieurs mois, je l'avais pas aimé malgré des critiques plutôt bonne

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  4. Quel enthousiasme ! Ce livre n'a pas déclenché l'enthousiasme à la bib, parce que c'est une lecture exigeante qui demande un effort je pense. Je le ferai peut-être, c'est quand même très tentant !

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  5. Cathulu: Tu as raison pour la couv. Je ne sais pas à quoi pensent les éditeurs!

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  6. J'ai lu de nons échos et vu ton enthousiasme, je me laisserai sûrement tenter :-) Mais lorsqu'il sera en poche.

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  7. Stephie: J'aimerais bien connaître ton avis!

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  8. esmeraldae, ce que tu dis là ne m'étonne pas trop! Les premières pages avec leurs très longues notes historiques en bas de pages et certaines phrases non traduites n'aident en rien la lecture, mais ensuite j'ai totalement adhéré à l'histoire!

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  9. Ys, pas étonnant: ce n'est pas un livre simple! C'est une oeuvre complexe, foisonnante, déroutante aussi au premier abord et puis, il faut dire que l'éditeur n'a franchement pas fait beaucoup d'efforts pour le mettre en valeur. C'est un livre jeune, très actuel et rien que la couverture plombe l'ensemble!

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  10. Manu, oui, le Poche lui conviendra peut-être mieux que ce noir et blanc sinistre alors que c'est un récit vivifiant et dynamique malgré tout! Avec une présentation colorée, très moderne, à la mode même, pourquoi pas, car ce sont des thèmes abordés aussi!

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  11. Quel enthousiasme ! Je le tenterai peut-être après l'été.

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  12. enfin un avis sur ce livre qui m'intrigue tant! je vais pouvoir l'ajouter à ma liste!

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  13. Aifelle, ce qui semble évident, c'est que même excellente, la traduction ne peut qu'affaiblir un tel livre, basé sur un rythme très scandé de l'écriture et un vocabulaire métissé, un tant soit peu argotique de là-bas!

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  14. Juliann, il me semble qu'avec un tel livre, on ne peut pas rester neutre. On aime ou on n'aime pas. Pas de demi mesure possible. Mais il faut dépasser les premières pages plutôt déroutantes!

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  15. J'avais repéré sa couverture, mais elle ne m'avait pas donné envie d'ouvrir le livre. Après ton avis, je le regarderai différemment ! :)

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  16. Je note, Mango, d'autant plus que ma meilleure amie d'enfance était dominicaine, petite-fille d'Espagnols qui avait fui le régime de Franco pour Saint-Domingue et dont les parents s'étaient exilés à New York sous la dictature de Trujillo.

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  17. Leiloona, cette couverture fait l'unanimité contre elle!

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  18. Lali, ton amie a exactement le même profil familial que le héros du livre!

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  19. Je ne connais pas du tout mais je vais le lire, topn article me donne vraiment envie de le lire.

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  20. Nina, j'espère que, comme certains lecteurs, tu ne te laisseras pas dérouter par le début! Ys a raison, ce n'est pas une lecture de tout repos car le style très nouveau peut dérouter!

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