L’infanticide est au cœur de ce roman sur l’esclavage en Amérique. Une jeune mère, en 1856, préféra égorger son bébé pour l’empêcher de subir comme elle les souffrances de sa condition d’esclave.
Le récit de Toni Morrison pour lequel elle recevra le prix Pulitzer en 1988 puis le prix Nobel en 1993, ce récit débute, lui, en 1873, dans l’Ohio, au 124, un lieu «habité de malveillance. Imprégné de la malédiction d’un bébé.» N’y vivent plus que Sethe et sa fille, Denver. La grand-mère, Baby Suggs, vient de mourir et les deux fils se sont enfuis, en plein hiver, à 13 ans, incapables de supporter plus longtemps les maléfices de cette maison maudite.
Un peu plus tard viendra y vivre Paul D, rescapé du Bon Abri, lui aussi, leur ancien lieu d’esclavage, le seul à réussir à contrer les actes malfaisants de la maison. Enfin apparaîtra Beloved, une jeune femme maigre et épuisée, le fantôme, l’esprit, la réincarnation de la petite fille sacrifiée qui prendra de plus en plus de poids dans la vie des trois autres. Avec elle, le passé resurgit avec les doutes, les souffrances, les oublis, les mensonges, la culpabilité et les interrogations de chacun.
C’est un roman très dur et très beau à la fois. J’ai souvent dû relire certains passages et revenir loin en arrière pour bien suivre le contexte du récit car parfois les croyances anciennes, les songes, les peurs, les espoirs des personnages prennent le dessus et j’étais submergée par une certaine forme de fantastique réaliste que j’avais du mal à bien cerner.
Plus que du récit en lui-même, mon plaisir est venu de la beauté de certains passages où domine le lyrisme des sentiments liés étroitement à la nature environnante. J’ai regretté de ne pas pouvoir lire ce roman dans sa langue d’origine mais même traduit, il conserve une grande force et c’est de l’admiration que je ressens avant tout. Contrairement à ce que je pensais en commençant, l’émotion en moi est demeurée au second plan. C’était un grand moment de lecture, pas un réel coup de cœur, cependant.
«Pour Sethe, l’avenir reposait sur la possibilité de tenir le passé en respect. Quant à Denver, tout ce qui importait pour Sethe était de continuer à la préserver d’un passé qui la guettait encore.»«Beloved luisait, et cela ne plaisait pas à Paul D. …Le soir, quand il rentrait à la maison et qu’elles étaient là toutes les trois à dresser la table du souper, la luisance de Beloved était si intense qu’il se demandait pourquoi Denver et Sethe ne la voyaient pas."
Beloved de Toni Morrison, Traduit de l’américain par Hortense Chabrier et Sylviane Rué (10/18,1989, 380 pages)
Un roman que je me promets de lire un jour, il me semble même que je l'avais démarré...
RépondreSupprimerC'est un livre magnifique qui mérite plusieurs lectures en réalité. Il ne livre pas si vite que ça toutes ses facettes.
SupprimerUn roman qui doit être poignant à lire... mais il est bon parfois de se souvenir de la souffrance passée et de se laisser toucher.
RépondreSupprimerC'est un récit dur, très dur comme l'étaient la réalité et les faits eux-mêmes mais l'auteur ne joue pas tant sur la sensibilité des lecteurs que sur leur compréhension et leur participation à ces phénomènes étranges dus à certaines croyances ancestrales et à un très fort sentiment de culpabilité. C'est un très beau livre.
SupprimerJ'ai toujours été effrayée par la dureté dont tu parles, comme Keisha je crois que je l'avais commencé, je me suis arrêtée en cours de route...
RépondreSupprimerC'est en deux fois que je l'ai lu aussi m'étant également arrêtée à mi-parcours pendant longtemps puis je l'ai repris. Il en vaut la peine.
SupprimerBonjour ! Sans rapport avec ce livre, je viens de voir dans la colonne de droite, qu'il y avait une LC autour de Maurice Leblanc le 1er juin. Ça m'intéresse bien, auprès de qui faut-il s'inscrire ? toi ?
RépondreSupprimerMerci et bonne journée.
C'est Lisa et Sylire pour le blogoclub qui organisent cette lecture commune de Maurice Leblanc. C'est à elles qu'il faut s'adresser.
SupprimerPeut-être pour plus tard mais ênce moment, j'ai besoin de lectures plus "légères"
RépondreSupprimerCelle-là ne l'est pas, je te le confirme.
SupprimerJe l'ai lu il y a très longtemps, alors que j'étais encore assez jeune (trop jeune ?). J'ai oublié les détails de l'histoire, mais je me souviens effectivement d'un livre très beau et très dur, dont la lecture m'avait marquée. Ton billet me donne envie de découvrir le reste de l'oeuvre de Toni Morrison, mais peut-être pas tout de suite, compte-tenu de ma PAL déjà surchargée ! ;-)
RépondreSupprimerTrès joli blog en tout cas. Je vais continuer à te suivre.
Miss Léo (blogueuse débutante)
Bonjour Miss Léo. Bienvenue dans la blogo littéraire. Merci d'être passée par ici. Je vais aller te lire à mon tour.
SupprimerC'est un roman qui m'a toujours fait peur, pourtant il m'apparaît comme une lecture indispensable. Un jour peut-être j'y arriverai ..
RépondreSupprimerJ'ai lu aussi "Un don" et "Love" et je t'assure que cette femme est une très grande romancière mais pas du tout sur le mode intimiste, comme tant d'autres. Ce sont des symphonies ses romans!
SupprimerJe n'ai lu qu'un roman de Toni Morrison, et à ma grande honte, je ne sais plus lequel... Je note celui-ci.
RépondreSupprimerElle a du souffle, on ne peur pas le lui contester.
SupprimerJe l'avais noté puis oublié, peut-être est-ce le moment d'y revenir...
RépondreSupprimerC'est un roman dur, très dur mais du genre chef d'œuvre symbolique absolu qui mérite d'être lu et relu en réalité.
SupprimerEt le film est très bien aussi.
RépondreSupprimerJ'aimerais bien le voir.
SupprimerUn livre que j'ai lu en VO pendant mes études et qui m'a marquée durablement! Magnifique, la prose de Toni Morrison...
RépondreSupprimerJe l'ai senti même à travers la traduction.
SupprimerJ'ai découvert Toni Morrison avec ce texte et je dois bien avouer que ce n'est pas une lecture facile...
RépondreSupprimerLecture pas simple mais prenante.
SupprimerOh non, une lecture difficile que j'ai eu du mal à appréhender et je suis d'ailleurs en partie passée à côté.
RépondreSupprimerA ma première lecture, c'est aussi ce qui m'est arrivé.
SupprimerJe dirais bien pareil que Manu : je crois l'avoir lu mais n'y ai pas été très sensible...
RépondreSupprimerSensible, sans doute pas, mais admirative, oui, je le suis maintenant.
SupprimerTu évoques très justement cette frontière floue entre croyances, songes et réalité du récit. Cela semble être une constante dans l’œuvre de Morrison et cela ne facilite pas la lecture, en effet (et en V.O., je ne te raconte pas. J'en avais bavé pour finir The bluest eye à la fac !). Je pense que cette confusion empêche que l'on se laisse emporter par l'émotion. En tout cas, chez moi, c'est le cas. Mais il n'empêche qu'on ne peut rester insensible à la plume brillante de Morrison.
RépondreSupprimerCette lecture est si riche qu'elle en est difficile tout d'abord mais c'est un roman ambitieux et polyphonique comme tous les grands romans qui ne sont pas forcément des plus faciles d'accès. Ici nous sommes à l'opposé d'une lecture du dimanche ou de l'été. Tu l'analyses très bien.
SupprimerPeut être parce que c'est le premier roman que j'ai lu de T Morrison c'est resté mon préféré.
RépondreSupprimerJ'aime tout , dur comme tu le dis, jamais larmoyant c'est vraiment une lecture exigeante et puissante.
J'ai beaucoup aimé aussi Le Don publié récemment
Elle a vraiment la carrure et toutes les qualités qui font les grands prix Nobel.
SupprimerUn roman que j'ai beaucoup aimé. Pas un coup de coeur non plus, mais une émotion forte.
RépondreSupprimerC'est exactement comme ça que je dirais aussi.
SupprimerJ'ai un profond respect et une grande admiration pour cette auteure que j'ai découverte il y a longtemps déjà pendant mes études à la fac... Beloved est peut-être un de mes chouchous... Quelle écriture, quelle force !
RépondreSupprimerJe ne connais que "Un don" de cette auteure, il ne mavait pas vraiment emballé, trop poétique, trop abstrait ...bref pas assez compréhensible pour moi !!
RépondreSupprimerJe l'ai pour ma part trouvé magnifique, ce roman. Dur, bouleversant mais magnifique tout de même...
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