L’écrivain parle ici des deux qualités opposées nécessaires à l’écriture: d’abord l’urgence, l’impulsion, la fougue, la vitesse qu’il faut pour se lancer, ensuite la patience, la lenteur, la constance, l’effort pour accoucher.
Pour lui qui se voudrait aérien mais qui est très organisé avec un côté monacal, tout importe: la condition physique, l’alimentation, ses lectures. S’il mettait un an pour écrire un livre à ses débuts, en y consacrant tout son temps, il lui en faut maintenant trois, en écrivant tous les jours et dans un lieu neutre, un appartement loué, en Corse ou à Ostende. Travailler chez lui, à Bruxelles, lui est impossible.
Il n’hésite pas à entrer dans les détails les plus matériels: sa préférence pour les carnets Muji sur lesquels il écrit exclusivement. (Il est très lu par les Japonais) et les marques de ses stylos préférés, «avec bille en carbure de tungstène, pointe fine ou micro»
«Je croyais aimer la littérature mais c’est l’amour de la papeterie que j’ai, ma parole!»
Ses chapitres s’intitulent: Le jour où j’ai commencé à écrire – Mes bureaux - Dans le bus 63 où il a lu «Malone meurt» de Beckett, en fin d’après midi – Moi, Rodion Romanovitch Raskolnikov où il avoue s’être complètement identifié au meurtrier de Dostoïewski.
Celui que j’ai préféré cependant, c’est celui sur Proust, un des rares auteurs à commencer par la patience et à terminer par l’urgence. Il prend tout son temps. Il n’existe pas de première version de son œuvre. Il se contente de vivre.
«C’est sa vie, la patience et l’urgence, c’est son œuvre.»
Proust est pour lui, le sommet de la littérature. C’est le livre non pas le plus lu mais le plus relu. Sur les conseils de sa mère il a sauté tout Combray la première fois, pour commencer par «Un amour de Swann» et ça lui a bien réussi.
Ses livres préférés ensuite :
Au-dessus du volcan
L’homme sans qualités
Le quatuor d’Alexandrie
J’aime bien cette réflexion :
«Les meilleurs livres sont ceux dont on se souvient du fauteuil dans lequel on les a lus.»
J’ai aimé lire ce livre et le conseille à tous ceux qui s’intéressent aux méthodes, manies, voire névroses de ceux qui font de l’écriture leur métier.
Jean-Philippe Toussaint, L’Urgence et la Patience, Paris, Éditions de Minuit, mars 2012, 107 pages
Cela pourrait m'intéresser, mais j'avoue un abandon du seul roman de lui que j'ai commencé...
RépondreSupprimerJ'ai bien aimé: "La vérité sur Marie", le seul de lui lu jusqu'ici.
SupprimerPour moi je n'ai rien abandonné de lui, je n'ai rien lu du tout !! mais là tu viens de faire vibrer la corde sensible, Dostoïevski, Beckett et Proust je ne peux qu'adhérer, j'avais des envie de petit tour en libraire, j'ai déjà la CB qui vibre !
RépondreSupprimerCeci dit, ce n'est qu'une plaquette, ce livre. Rien de très approfondi sur les artistes en question si ce n'est le rapport très personnel que l'auteur entretient avec eux - mais ça m'a intéressée. !
SupprimerJe pense que ça me plairait !
RépondreSupprimerJe pense aussi.
SupprimerCe livre jette une impression d'urgence dans mes désirs de lecture, oh merci ! ( il est vrai que le seul nom de Proust est pour moi un déclic automatique ;-) ! )
RépondreSupprimerJ'ai pensé à toi justement en lisant les passages sur Proust. C'est un grand connaisseur, amoureux de son œuvre.
SupprimerJe ne l'ai jamais lu mais ce genre de livres ne me tente guère.
RépondreSupprimerContrairement à moi!
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