samedi 16 juin 2012

"Demande à la poussière" de John Fante

Je viens de le finir. Un livre beau et prenant. La fin est de toute beauté.  Il n’a pas été des plus simples à lire. Pas comme le premier qui m'avait fait connaître l'auteur - offert par le libraire pour deux autres achetés.  «Mon chien stupide»,  un coup de cœur immédiat lu presque d’une traite (Ici)
Non celui-ci a été plus dur. J’ai vécu les montagnes russes avec lui. Il y a eu des hauts et des bas mais la langue, elle, cet étonnant mélange de style, syncopé et poétique à la fois, m’a terrassée. 
Son style n’appartient qu’à lui:  brisé, blessé mais têtu, «fonce dedans», à cru. Le contraire du style élégant et feutré. 
Que dire de l’histoire tout en évitant de trop résumer? Je retiens avant tout que ça semble  vécu par l’auteur tant c’est plein d’émotions retenues. Son héros, Arturo Bandini , jeune auteur d’une vingtaine d’années  qui attend d’être enfin publié,  raconte son histoire d’amour fou,  à Los Angeles,  dans les années quarante,  avec Camilla, une serveuse  de bar, de laquelle il s’entiche violemment et définitivement malgré tout ce qu’elle lui fera voir. Elle n’est pas facile, en aime un autre qui la déteste. Elle aime les chiens et la marijuana.  Elle sera  le premier véritable amour de Bandini qui ne la laissera jamais tomber, et pourtant ! 
Mais ce n’est pas ça l’important. 
C’est le héros lui-même qui m’a intéressée. C’est un drôle de type.  Pas facile à comprendre. Paumé, désarmé, sans ami, sans aide dans une ville hostile où il ne connaît personne et où il ne se fera pas d’amis mais qu’il connaît par cœur à force d’y déambuler jour et nuit. Il ne fait rien, si ce n’est attendre la sortie de son premier roman.  Son éditeur lui envoie régulièrement de l’argent qui lui sert à vivre chichement car il dépense tout pour cette Camilla.  Il dépense à tort et à travers. Il est trop généreux et on a envie de lui dire de se protéger  de tout et de tout le monde et surtout de lui-même. Sa force, c’est sa foi dans son destin d’écrivain . Il est sûr d’y arriver et ne pense qu’à ça. Mais sa fragilité, c’est son  amour pour les plus déshérités que lui. 
Fils d’immigrés italiens,  il est hanté par son éducation chrétienne. La culpabilité le poursuit, bref, c’est un personnage très complexe, très puissant que je ne suis pas prête d’oublier. J’ai ressenti le même attachement pour un autre grand de la littérature, le Martin Eden, de Jack London.

Des livres comme ça, j’en voudrais tous les jours ! 
Los Angeles, donne-toi un peu à moi! Los Angeles, viens à moi comme je suis venu à toi, les pieds sur tes rues, ma jolie ville je t’ai tant aimée, triste fleur dans le sable, ma jolie ville. 
Alors voilà Bandini qui s’amène, pas grand mais râblé, fier de ses muscles, le voilà  qui serre le poing pour jouir du délice que lui procure son biceps durci, voilà Bandini absolument sans peur, peur de rien, sauf de l’inconnu qu’il va trouver dans un monde merveilleusement mystérieux. Est-ce que les morts reviennent? Les livres disent que non, la nuit hurle que si. 
J’ai vingt ans, j’ai l’âge de raison, j’ai le droit d’aller écumer les rues en bas pour me chercher une femme.Mais tu n’as rien fait et ton talent est douteux, ton talent est à faire pitié, et quel talent d’abord? Alors tu déambules sur Bunker Hill en agitant le poing contre le ciel et je sais ce que tu penses, Bandini. Exactement les mêmes pensées que ton père a eues avant toi, comme autant de coups de lanière sur ton échine, comme du feu dans ton crâne, que tu n’y es pour rien. 
Et je traîne dans Downtown, la poussière des trottoirs recouvre mes savates d'un autre âge. Je décide de rentrer dans mon hôtel miteux pour écrire.
Demande à la poussière de John Fante Traduit de l’américain par Philippe Garnier, (10/18) Préface de Charles Bukowski.  (Ask The Dust)

24 commentaires:

  1. Oh mais Fante, je veux le lire depuis... des années!

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  2. certes, beaucoup moins léger que "Mon chien stupide", encore que... j'ai bien envie de lire les mémoires du fils, parce que les relations de cette famille m'avaient vraiment marquées (et London, c'est Jack).

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    1. (Merci pour Jack) En choisissant le roman de John Fante, j'ai eu envie aussi de mieux connaître son fils et j'ai pris "Les anges n'ont rien dans les poches", son premier roman, une fiction autobiographique qui lui a sauvé la vie, selon lui. Je verrai si je l'aime aussi.

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  3. J'ai lu ton billet en diagonale car je le continue dès que je me suis avancée dans mes Lv... Six mois qu'il traîne, que je le prends, l'entame, le repose, et vrai qu'il n'est pas si facile ! Je relirai ton billet en entier quand je l'aurai fini !^^

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    1. Surtout, surtout, ne le quitte pas sans en lire la fin. C'est vrai que c'est un livre magnifique mais pas de ceux que l'on prend simplement pour se chasser les idées.

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  4. Bon, c'est vilain, il faut que je le lise maintenant! Je n'ai jamais lu l'auteur, pourquoi ne pas le découvrir!

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    1. C'est tout un monde en lui-même mais on ne peut pas le lire à la va vite sinon on risque de passer à côté! Essaie! Surtout que tu peux le lire en VO. Quelle chance!

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  5. J'ai eu ma période Fante :-). J'avais lu celui-ci et mon chien stupide et puis d'autre... C'est un auteur que j'apprécie

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    1. C'est à mon tour d'être en plein dans cette période alors car j'embraye avec les livres de son fils. Ce qui n'était pas prévu du tout. Je vais aller lire maintenant tes billets sur Fante. Comptes-tu t'y remettre?

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  6. Fante, je ne le connais pas encore ... Ton billet me donne envie de le découvrir.

    Y.

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    1. J'aimerais bien qu'il te plaise! (PS: As-tu commencé Wharton? )

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  7. Un de mes livres préférés. J'ai lu tout Fante avec une préférence pour Bandini. Juste un petit conseil : maintenant que tu as lu Demande à la poussière, il faut absolument que tu lises La Faim de Knut Hamsun. Si tu t'intéresses à la littérature comparée tu vas voir que Demande à la poussière est une réécriture de La Faim, un roman qui a marqué Fante à tout jamais. La comparaison entre les deux est juste passionnante (de mon point de vue tout au moins).

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    1. J'adore ce genre de suggestion qui élargit le champ de mes lectures. Non je ne connais pas ce livre mais je vais m'y mettre. Juste le temps de le trouver. Pour l'instant je lis Dan Fante: "Rien dans les poches", son premier roman où il raconte son retour à L.A. pour revoir son père mourant à l'hôpital. Terrible!

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    2. Super, le 1er roman de Dan Fante ! Lors de sa 1ère publication en France, il s'intitulait "Les anges n'ont rien dans les poches", je trouve ce titre plus beau d'ailleurs. C'est dans une interview de lui réalisée à l'époque qu'il expliquait l'admiration de son père pour La faim et le fait que ce roman l'avait beaucoup influencé pour écrire Demande à la poussière.

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  8. J'ai lu Bandini il y a quelques années (avant blog) et ça a aussi été une lecture difficile. J'ai depuis Demande à la poussière dans ma PAL mais que je n'ai pas encore osé sortir ! Il faudrait que je m'y mette.

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    1. Il faut aimer ce style et cette vie, elle-même difficile malgré son succès.

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  9. Lu un roman de cet auteur, je n'avais pas réussi à entrer dans le roman. Il faudra que je ré-essaye.

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    1. Sa manière d'écrire et sa vie qui n'est pas de tout repos peuvent surprendre au début peut-être mais il réussit à nous entraîner avec lui sans pour autant qu'on puisse nécessairement nous identifier au personnage. Il ne faut pas être trop jeune pour l'apprécier.

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  10. des billets comme ça, on en voudrait tous les jours... ou pas... je noterais trop souvent ;-)

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    1. Des livres comme ça, j'en lirais bien tous les jours, je t'assure!

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  11. Un auteur que je n'ai jamais lu, dont je croyais la réputation plutôt sulfureuse. je dois confondre avec un autre auteur.

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    1. Peut-être confonds-tu avec Bukowski qui l'admirait!

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  12. Ah, ce roman !!! Il m'a complètement prise aux tripes ! Lire ton billet m'a rappelé le style si déroutant, sa relation à la ville, son amour pour Camilla, la difficulté d'écrire, les oranges et le rythme étrange... J'ai "Mon chien stupide" dans ma PAL, je crois que je vais l'en sortir plus vite que prévu !

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