Charles Bukowski (1920-1994) demeure l'un des auteurs américains les plus marquants de la fin du XXe siècle. Révélé au début des années soixante-dix par son roman Le Postier et son Journal d'un vieux dégueulasse (en France, il faut attendre 1978 et son scandale à Apostrophes), il devint l'une des icônes de la littérature américaine, dont l'influence sur ses pairs sera considérable et dépassera largement le milieu littéraire. Alcoolique, provocateur et punk avant l'heure, il fit de sa vie et de ses frasques la matière d'une oeuvre romanesque et poétique largement autobiographique.
Le journaliste anglais Howard Sounes a mené une véritable enquête, longue de plusieurs années, auprès de la famille, des proches, des amis et des maîtresses de Bukowski pour écrire cette biographie de référence. De l'enfance sous la coupe d'un père violent aux années de vaches maigres, d'alcool et de petits boulots, des premières publications poétiques au succès international qui le mènera jusqu'à Hollywood, il retrace la vie d'un homme convaincu très jeune, envers et contre tout, de sa vocation d'écrivain. Il livre aussi beaucoup de révélations sur les débuts de la carrière littéraire de Bukowski, ou encore sur sa première compagne, Jane Cooney Baker, qui servit de modèle au personnage de Wanda, interprété par Faye Dunaway dans le film Barfly.
(Faye Dunaway, Bukowski, Mickey Rourke)
Riche d'une profusion de textes, lettres et photographies inédits, de témoignages de personnalités tels Norman Mailer, Allen Ginsberg, Sean Penn, Mickey Rourke ou encore Robert Crumb, cette passionnante biographie se dévore comme un roman de Bukowski, cru et excessif, cocasse et émouvant. (4e de couverture)
Que m’a appris cette biographie qui m’a particulièrement frappée ? Son enfance et sa jeunesse ont été solitaires et difficiles en raison de la sévérité de son père et d’une acné plus importante que les autres avec de grosses pustules sur le visage, ce qui le maintenait à l’écart des autres et surtout des filles qu’il mit très longtemps avant d’approcher. Il a souffert alors d’un fort sentiment d’exclusion. Il haïssait ses camarades plus chanceux que lui tout en se promettant de devenir un jour comme eux.
Son sanctuaire était la bibliothèque municipale de Los Angeles autant parce qu’elle était fréquentée par de nombreuses filles que pour y lire tous les livres qu’il désirait. C’est ainsi qu’il tomba sur un ouvrage qui eut sur sa vie une influence décisive: le roman de John Fante: «Demande à la poussière» (Ask the Dusk), un livre écrit dans un style saisissant, lucide, sans fioritures, composé de courts chapitres et de courts paragraphes. Le sujet surtout retint son attention. " Le héros, Arturo Bandini, est un apprenti écrivain de vingt ans, fils d’immigrés italiens. Il se sent en marge de la société. Il voudrait écrire sur la vie et l’amour, mais il sait qu’il manque d’expérience. Aussi décide-t-il d’aller vivre dans un hôtel miteux dans un quartier populaire de Los Angeles où il rencontre une très belle jeune femme dont il tombe aussitôt amoureux."Dès cette lecture, Bukowski prend l’habitude d’aller lire au pied des hôtels meublés décatis de sa ville, s’imaginant faire partie de l’univers de Fante, ce qui l’encourage à écrire. Il avouera:
"Fante était mon dieu. Encore aujourd’hui son influence continue à s’exercer sur mon style."
Parmi les dix ou douze autres romans qui ont eu une influence durable sur lui, il y a encore: La faim de Knut Hamsum dont le héros plein d’illusions est sauvé par la littérature et Mémoires écrits dans un souterrain de Dostoïevski où le narrateur se juge hideux tout en brûlant d’être aimé. "Voyage au bout de la nuit" de Céline fait aussi partie du lot. C’était dans les années de guerre 1940/42, quand il traversait l'Amérique d’est en ouest en autocar et en train en compagnie parfois de vagabonds du rail.
(Sa machine à écrire, cadeau de ses parents pour ses études mais quand son père s'aperçut qu'il s'en servait pour écrire des nouvelles, il la jeta dans le jardin avec les manuscrits et les vêtements de son fils.)
Je passe sur ses amours nombreuses, douloureuses, ses amitiés et ses beuveries à foison qui lui ont valu sa réputation sulfureuse qui ne m’intéresse pas vraiment pour retenir surtout ce qui fait de lui un écrivain conséquent de sa génération: sa langue "débarrassée des affectations, des procédés et des maniérismes qui dominent dans la poésie académique". Son style à lui, c’est «la langue parlée clouée au papier».
C'est une belle biographie sur un auteur que je connaissais assez peu, en dehors des scandales qu'il a souvent provoqués dont son expulsion de l'émission de Pivot où il était invité ICI,
Il me reste quatre chapitres à lire encore sur les 16 du volume.(me souvenir que je me suis arrêtée à la page 235: "Fils d'Europe"). Je compte bien le terminer le plus tôt possible.
Charles Bukowski, Une vie de fou par Howard Sounes, Biographie (éditions du Rocher, 2008, 390 p) Traduit de l’anglais par Thierry Beauchamp
«lorsque vous me verrez sourire dans
ma Volkswagen bleue
accélérant à l’orange
roulant droit dans le soleil
je serai prisonnier des
bras d’une
vie de fou»
J'ai lu un de ses livres L'amour est un chien de l'enfer et c'est particulier !Mais vu ce que tu dis, je comprends mieux son écriture et ses thèmes de prédilection.
RépondreSupprimerDifficile à oublier une fois qu'on l'a lu. J'ai lu son Journal et c'est très fort!
SupprimerJ'ai toujours fui la beat génération après avoir abandonné Sur la route. Mais ce que tu dis me rends curieuse. Par contre, j'ai Demande à la poussière dans ma PAL.
RépondreSupprimer"Demande à la poussière", je ne l'ai pas lu mais rien que le titre me plaît beaucoup. J'aime Kerouac mais rien à voir avec Bukowski. Le seul de cette Beat Generation qu'il admirait était Neal Cassady, l'inspirateur de "Sur la route". A part lui, il n' aimait pas les autres.
SupprimerBukowski est l'auteur qui a déclenché chez moi la passion pour la lecture. Il restera à jamais l'auteur le plus marquant de ma vie de lecteur. Son univers, son écriture, son humour, son regard unique porté sur le monde qui l'entoure m'ont durablement marqués. Et puis c'est grâce à lui que j'ai découvert Fante, Knut Hamsun et plus tard Selby ou Carver. Il restera à jamais mon auteur préféré.
RépondreSupprimerPS pour Manu : Bukowski n'a pour moi strictement rien à voir avec les auteurs de la beat generation que je ne supporte pas. Il y a d'ailleurs un ouvrage intitulé Buk et les beats ou l'auteur, malgré le titre, insiste sur le fait que Bukowski est toujours resté très à la marge du mouvement de Kerouac & co.
Tu le connais bien et il t'a influencé à ce point! Je ne le pensais pas! Il n'aimait pas les Beat, c'est exact et selon Howard Sounes, il leur reprochait principalement leurs penchants homosexuels mais il fit une exception pour le poète Harold Norse, l'auteur de"Beat Hotel" qui devint son ami.
SupprimerCe que je retiens de Bukowski, c'est son fameux passage chez Pivot ^^
RépondreSupprimerMoi aussi et c'est dommage car tellement réducteur. Ses livres valent mieux que cette navrante apparition!
SupprimerJérôme m'a donné envie de le découvrir et je viens de lire Pulp son dernier roman, ce ne sera pas le dernier pour moi car j'ai bien adhéré au style
RépondreSupprimeret ton article me confirme que c'est un auteur qui en vaut la peine
Il en vaut la peine, certainement et j'ai bien envie de lire Pulp à mon tour. Sollers en parle très bien.
SupprimerQue ne donnerais-je pour lire:«Demande à la poussière» (Ask the Dusk) de john Fante!Je suis sujugué par la richesse qui a entouré ce grand écrivain dans sa vie pleine à foison! On ne te remerciera jamais trop Mango de ta gentillesse pour nous faire découvrir autant de choses, c'est tout simplement merveilleux!
RépondreSupprimerJ'aimerais vraiment beaucoup aussi lire ce Fante-là. C'est un de mes écrivains fétiches.
SupprimerJe n'arrive pas à m'intéresser à ce monsieur ...
RépondreSupprimerL'homme, je ne l'apprécie pas, du moins pour l'image que j'en ai mais l'auteur, je ne sais pas. Je devrais le lire davantage pour mieux juger.
Supprimerje tiens la mais à Aifelle, je n'arrive pas à lire ce monsieur et franchement il ne m'interesse pas du tout mais par contre j'ai lu ton billet avec grand intérêt histoire de voir si je faisais fausse route, tu donnerais envie d'ouvrir un de ses livres malgré tout !
RépondreSupprimerIl m'intéresse surtout en raison des auteurs qui l'ont apprécié. J'essaie de comprendre pourquoi .
SupprimerComme Jérôme, je n'aurai pas rattaché Bukowski à la beat génération, et comme lui, je suis une adepte de ses nouvelles et de celles de Carver.
RépondreSupprimer( terrible l'anecdote sur la machine à écrire ! )
Lui-même a toujours refusé l'étiquette de Beat, d'ailleurs.
SupprimerJe me souviens très bien de son passage chez Pivot, mais ça c'est anecdotique.
RépondreSupprimerCette biographie m'intéresse beaucoup.
Oui, cette séquence a marqué les spectateurs et il raconte lui-même cet épisode dans son dernier livre qui vient de sortir.
SupprimerVoilà un auteur qu'il me faut découvrir, mais je ne sais pas trop par quoi commencer...
RépondreSupprimerJe ne saurais pas te conseiller car ,il m'a beaucoup heurté au premier abord. Peut-être le livre qui vient de sortir: "Shakespeare n'a jamais fait ça", une sorte de journal.
SupprimerCe billet date maintenant, mais pour d'éventuels nouveaux lecteurs, je ne saurais que vous conseiller de commencer par Les contes de la folie ordinaire. On n'a pas du tout à fréquenter le personnage assez "spécial" de Bukowski, mais on se laisse halluciner par ses nouvelles très... loufoques, crues, et poignantes. C'est ma première lecture de lui, qui m'a poussé à dévorer sa biblio entière. (ce qui a été traduit en français, j'entends...)
SupprimerSinon, Pulp est plus soft, c'est celui que je recommande souvent à mes amis qui craignent un peu. On y retrouve malgré tout un "fil directeur", même si le roman se barre un peu n'importe comment, et on ne retrouve pas la redondance cyclique à laquelle il nous habitue avec Factotum ou Women. (sans que ça soit chiant, entendons nous!)
Sinon, j'ai acheté Une vie de fou de Sounes il y a quelques jours, d'occasion (10€, avec Shakespeare n'a jamais fait ça, à 10€ aussi, yesss!), et j'ai malgré tout assez peur de relire des anecdotes trop connues (on retrouve l'anecdote de la machine à écrire dans deux ou trois de ses romans, sans compter l'épisode du "le docteur m'a dit que j'ai failli crever, que si je buvais un verre de plus j'étais mort, mais je bois encore, et je suis pas mort" qui revient à chaque fois avec des détails différents, une ambiance différente, une profondeur différente, mais toujours un goût de déjà-lu... )
Par contre, les témoignages de Rourke/Penn/Ginsberg m'attirent au plus haut point, ainsi que ceux de ses proches et de sa famille. (mais j'ai là aussi peur de retrouver globalement les mêmes choses que dans le film documentaire nommé Bukowski : Born Into This.)
Mango, si tu lis cette réponse, je serais ravi que tu me tiennes au courant de tes (éventuelles?) nouvelles lectures de ce (malgré tout) génie. Et de Fante aussi, car avoir lu Fante sans avoir lu Ask The Dust, c'est péché! :P
Aucune admiration pour l'homme, aucune admiration pour l'auteur dont j'ai tenté de lire 3 livres sans en finir aucun
RépondreSupprimerJe n'ai pas d'estime particulière pour lui non plus mais beaucoup de curiosité vu son influence sur plusieurs auteurs de sa génération.
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