Tout commence par un article de journal où on apprend qu’un VRP a été retrouvé nu dans sa voiture bloquée par la neige sur une route au nord de l’Ecosse. A ses côtés on a trouvé deux bouteilles de whisky vides, deux cartons renfermant 400 brosses à dents et un grand sac-poubelle rempli de cartes postales d’Asie. Il s’agit de Mr Maxwell Sim, 48 ans, domicilié à Watford, en Angleterre, spécialiste de produits d’hygiène bucco-dentaire écologiques pour une société mise en liquidation le jour même.
C’est de la vie intime de ce Max Sim, un type des plus banals, dont il est question tout au long de ce roman que j’ai trouvé éblouissant et jubilatoire, un grand moment de lecture.
Le héros n’est qu’un pauvre homme en pleine crise identitaire, frôlant la dépression et souffrant de solitude après l’éloignement de tous les siens. Sa femme l’a quitté avec sa fille, sa mère est décédée très jeune, son père est la froideur même et son meilleur ami lui en veut pour avoir fait du mal à son fils. Lui-même, bien sûr, ne s’aime pas et il est en passe de perdre aussi son travail.
Caricature du loser? Sûrement! Il cumule tous les clichés: il échoue dans tout ce qu’il fait et son départ d’Australie où il devait se réconcilier avec son père en est l’exemple type. Malgré de belles rencontres dues au hasard généreux ce jour-là, les belles promesses s’envolent aussitôt avec la mort subite de son voisin à qui il racontait sa vie, avec le vol de son portable où était enregistré le numéro de la belle et généreuse Poppy, la nièce de Clive. Très important Clive! Très!
Bon ce n’est que la goutte d’eau du début de l’action mais il y a tant d’épisodes romanesques, à la fois fantasques et réalistes dans ce roman qu'il faudrait copier le paragraphe final qui résume l’essentiel de l'intrigue, de l’avis même de l’écrivain, celui du début, à l'aéroport… Et des personnages tous plus ou moins drôles, ayant un lien avec le passé ou l'avenir de Mr Sim, ce n’est pas ce qui manque ici. Ils foisonnent. L’auteur a pris plaisir à les créer et à jouer avec eux, ainsi , en ouverture et en clôture du récit, ce beau couple de la chinoise brune et de sa petite fille blonde qui semblent si heureuses en jouant aux cartes, au restaurant de la plage, le deuxième samedi de chaque mois.
Mais l'auteur se voit aussi en tueur en série: ne fait-il pas mourir ses personnages quand il le veut?
Cependant, il ne faut pas se tromper, c’est le lecteur qui est au cœur de ce brillant récit satirique, dans un monde occidental très déstabilisé par les nouvelles technologies et les bouleversements sociaux des années 2010. Le romancier, de son propre aveu, est le marionnettiste qui manipule et tire les ficelles. . Il rappelle cette évidence que c’est lui le maître, l’artiste qui crée ses propres acteurs et les fait disparaître à volonté, d’un simple claquement de doigts. Il ne faut surtout pas rater la fin, pirouette inattendue mais logique qui me satisfait pleinement puisqu'elle justifie le triomphe de l'art en somme. Imagination débridée, drôleries, surprises, humour, tout m'a enchanté et surtout l'optimisme qui finalement se dégage d'une aventure qui semblait pourtant bien mal partie.
(roman gallimard, traduit de l’anglais par Josée Kamoun, 2011,
(The Terrible Privacy of Maxwell Sim, 2010, 452 p.)
(Roman pour le challenge d'Anne: Angleterre)
Au cas où je n'aurais pas été assez claire, j'ajoute le résumé de l'éditeur.
"Max Sim, le protagoniste principal, est un antihéros par excellence, voué à l'échec dès sa naissance (qui ne fut pas désirée), poursuivi par l'échec à l'âge adulte (sa femme le quitte, sa fille ne le regarde guère, sinon pour rire sous cape), s'acceptant d'ailleurs en tant qu'échec et y trouvant même une certaine paix : l'absence de lutte, enfin.Savoir s'accepter devient l'un de ses mots d'ordre A force de solitude, il finit par converser avec son GPS au long de ses pérégrinations de commis-voyageur représentant en brosses à dents dernier cri. Il tombe amoureux de cette voix désincarnée, lui imaginant même une personnalité, et les dialogues engagés avec elle partagent le lecteur entre le rire et la compassion. Le drame essentiel réside pourtant dans la relation avec son père, dont il découvre en lisant son journal qu'il était homosexuel et l'a conçu, lui, Max, par accident pourrait-on dire.
Mais il va tout de même essayer de se réconcilier avec ce père et même, de lui faire retrouver son ami de coeur, l'extraordinaire Roger S. Un échec là encore, mais l'échec est l'un des ressorts du comique. Jonathan Coe renoue ici avec la veine comique tout en gardant la même complexité, la même précision, la même habileté que dans ses livres précédents. Tout à la fois drôle, bien construit et situé à la pointe du contemporain, le roman procède par mélange de genres, suite d'échos, de souvenirs récurrents, de parallèles, de rappels, pour tenter de cerner la grand interrogation: jusqu'à quel point la vie peut être considérée comme une fiction?"
Pas facile de laisser un comm aujourd'hui chez toi Mango ! C'est la révolucion ?^^ Je l'ai dans ma LAL depuis un an mais je voulais lire avant Testament à l'anglaise qui lui est dans ma PAL !!! Arrgh, le temps...
RépondreSupprimerToute l'après midi d'hier j'ai eu des problèmes de liaison internet en effet. J'ai aimé aussi "Testament à l'anglaise", beaucoup, mais celui-ci est plus joyeux avec pourtant un personnage bien falot au départ. Je crois que je l'ai préféré mais c'est peut-être parce que je viens de le finir!
SupprimerJ'étais déjà résolue à l'acheter mais là ton billet me donne envie de courir immédiatement jusqu'à ma librairie !
RépondreSupprimerUn des seuls livres que j'achèterai cette année en dépit de mes résolutions PALesques ^^
Tu as raison de le choisir car c'est un grand parmi les grands. Vraiment!
SupprimerIl est déjà noté, mais là il va falloir que je m'en occupe d'urgence avec un billet pareil !
RépondreSupprimerDès que tu en as l'occasion, ne l'oublie pas!
SupprimerLu et évidemment beaucoup aimé (mais chut, tu en racontes presque trop -ou alors c'est parce que je l'ai lu -bon, je ne dis rien!)
RépondreSupprimerC'est parce que tu l"as lu! J'ai fait particulièrement attention à ça! Enfin, j'espère!
SupprimerJe suis ravie que tu l'aies aimé aussi : c'est un roman particulièrement original et brillant !
RépondreSupprimerJe crois avoir vu qu'il sort bientôt en poche...
En Poche, il devrait s'envoler. Quelle joie de lire un texte pareil. Il mériterait que je le relise. Dans quelque temps peut-être!
SupprimerUn billet tentateur ! Je vais devoir me pencher de près sur le cas de Mr Smith.
RépondreSupprimerS'il se présente à toi d'une façon ou d'une autre, surtout n'hésite pas!
SupprimerEt bien quel enthousiasme !
RépondreSupprimerJe l'ai réservé à la bibliothèque, tu penses !!
Bon dimanche Mango ...
Y.
Ah, j'ai hâte de savoir ce que tu en penses. Surtout n'hésite pas à venir m'en parler. Mon enthousiasme m'étonne parfois. Il me tombe dessus sans que j'aie vraiment le temps de l'analyser! J'envoie désormais ce roman au rang de mes coups de Cœur (tiens, j'ai oublié de le dire!) Au même titre que celui d'Irving de janvier dernier. Comme il y a eu l'année d'Irving, il y aura celle de Coe! Youpee!!!
SupprimerJe suis tentée de le lire - mais il faut QUE JE LISE ceux que j'ai dans ma PAL. J'ai des hauts et des bas avec cet auteur, dont l'humour ne m'est pas toujours évident !
RépondreSupprimerPeut-être l'est-il un peu plus ici. C'est du moins l'impression que j'en ai mais évidemment ça reste subtil. Le narrateur qui va d'échec en échec, rebondit toujours et finalement se juge en se racontant et obtient du lecteur un sourire complice ou de connivence comme quand il ne sait pas répondre à la question de sa petite fille sur les raisons qui font que l'herbe est verte et non d'une autre couleur. Il s'en sort par un conte et s'en veut évidemment:
Supprimer"Eh bien, voilà, dit-il. Toutes les nuits, les fées sortent avec leurs petits pinceaux et leurs pots de peinture verte...
Bon Dieu! il y avait des fois où il se détestait."
Un livre qu'il faudrait approfondir par une relecture.
Apparemment Mr Sim est trés privé de tout surtout de la chance!
RépondreSupprimer:) Exactement surtout au départ! Pas de chance vraiment!
SupprimerRalala, que de billets positifs, je me demande bien pourquoi je n'ai pas sauté la pas encore, tiens.
RépondreSupprimerPrépare-toi à un bon moment quand tu commenceras ce roman!
SupprimerC'est sûr, grâce à toi, je l'achète pendant mes vacances en GB. Il est temps que je lise un second Jonathan Coe.
RépondreSupprimerIl est à lire et sincèrement j'espère que tu ne seras pas déçue!
SupprimerIl est noté, ton billet me donne très envie de lire ce livre.
RépondreSupprimerNe te prive surtout pas de ce plaisir de lecture avec ce roman!
Supprimerj'ai encore un livre dans ma pal de cet auteur - faut que je vérifie, mais ton billet m'en donne envie :)
RépondreSupprimerJ'avais un peu moins aimé les deux précédents mais bon, question de goût tout simplement sans doute!
SupprimerJ'ai toujours aimé ce que j'ai lu de Coe... du coup, je suis tentée par celui-là aussi! Fou, romanesque... ça peut me plaire.
RépondreSupprimerJe suis certaine que ça te plaira!
SupprimerC'est un souvenir de lecture (et de rire) encore très vivace, dont on a justement parlé vendredi dernier, à l'oocasion d'un rencontre linraires, bibliothécaires, clubs de lecture sur le top 10 de l'édition 2011 !
RépondreSupprimerJe sais que tu l'as beaucoup aimé aussi! De très bons souvenirs en somme!
SupprimerCoe est assez doué pour créer des personnages de losers attachants et plein de ressources. Si tu te décides à continuer la découverte de l'auteur, je te re-conseille "Bienvenue au club" et "Le cercle fermé".
RépondreSupprimerEt merci pour le lien!
Je ne vais pas m'arrêter aux deux seuls livres de Coe que j'ai lus. Je suis bien décidée à continuer.
SupprimerAhah Cynthia est en train de craquer :-D
RépondreSupprimerBon, moi, c'est décidé, je le lis très bientôt !
J'ai hâte de voir ce que tu vas en penser et s'il te plaira également beaucoup.
SupprimerUn auteur que j'aime bien. Même si je n'ai aps encor elu celui-ci.
RépondreSupprimerJe me demande si ce n'est pas le roman que je préfère finalement quoique... j'ai beaucoup aimé aussi "Le testament à l'anglaise"!
SupprimerIl faut absolument que je lise ce livre, et par la même occasion, je ferai connaissance avec l'auteur qui ne sait encore jamais trouvé entre mes mains. Allez, hop, dans ma LAL !
RépondreSupprimerJe crois que tu serais contente de lire ce livre.
SupprimerJe n'ai lu de Coe que La maison du sommeil et ton billet me donne envie d'aller piocher dans ma PàL car j'en ai 3 ou 4 autres en en poche.
RépondreSupprimerJ'ai bien aimé cet auteur jusqu'ici mais je suis loin d'avoir tout lu. En tout cas celui-ci m"a énormément plu. N'hésite pas à ressortir les livres que tu as de lui!
SupprimerCe livre nous surprend positivement jusqu’à la fin et ne connaissant pas cet auteur je ne sais pas si c’est une habitude chez lui de faire des digressions ou s’il s’agit d’un essai ( réussit).
RépondreSupprimerC'est un livre avec de l’humour, où des sujets intéressants sont abordés avec honnêteté et sans préjugés.
Nous sommes toujours en mouvement dans ce livre, soit de manière temporelle soit géographiquement soit humainement….
J'ai apprécié ce livre ...kifud