dimanche 4 décembre 2011

La servante au grand cœur dont vous étiez jalouse - Baudelaire

La servante au grand cœur dont vous étiez jalouse,
Et qui dort son sommeil sous une humble pelouse,
Nous devrions pourtant lui porter quelques fleurs.
Les morts, les pauvres morts, ont de grandes douleurs,
Et quand Octobre souffle, émondeur des vieux arbres,
Son vent mélancolique à l’entour de leurs marbres,
Certe, ils doivent trouver les vivants bien ingrats,
À dormir, comme ils font, chaudement dans leurs draps,
Tandis que, dévorés de noires songeries,
Sans compagnon de lit, sans bonnes causeries,
Vieux squelettes gelés travaillés par le ver,
Ils sentent s’égoutter les neiges de l’hiver
Et le siècle couler, sans qu’amis ni famille
Remplacent les lambeaux qui pendent à leur grille.

Lorsque la bûche siffle et chante, si le soir,
Calme, dans le fauteuil je la voyais s’asseoir,
Si, par une nuit bleue et froide de décembre,
Je la trouvais tapie en un coin de ma chambre,
Grave, et venant du fond de son lit éternel
Couver l’enfant grandi de son œil maternel,
Que pourrais-je répondre à cette âme pieuse,
Voyant tomber des pleurs de sa paupière creuse?

Charles Baudelaire, Les Fleurs du Mal, C.
Tableaux: Pieter Jannsens Elinga,  Camille Pissaro

11 commentaires:

  1. Baudelaire = émotions, puissance de l'évocation. Merci pour ce partage, bon dimanche, Mango

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  2. merci de ce beau poéme et des ses spendides tableaux , je vous embrasse , Mango

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  3. Anne, entendu hier et très bien dit mais je n'ai pas retenu le nom du comédien.

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  4. Frankie pain, Merci d'être passée et bon dimanche.

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  5. Ah, Baudelaire, c'est toujours un plaisir !

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  6. Irrégulière, Bien que les connaissant presque par cœur,j'aime aussi les faire apparaître sur mon blog.

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  7. Un très beau poème. On ne se lasse jamais de Baudelaire.
    Très beaux ces tableaux.

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  8. Oh merci ! Tiens, ça me donne envie de ressortir mon recueil...

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  9. liliba, C'est toujours un bon moment,une petite incursion chez Baudelaire.

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  10. Baudelaire... toujours on en redemande, et jamais on ne se lasse !

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